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Le 28 avril, de grandes manifestations ont débuté dans plusieurs villes de Colombie. Elles ont marqué le début d’un immense mouvement social opposé aux politiques du gouvernement. Malgré la violente répression de l’État Colombien soutenu par les États-Unis, la contestation ne s’est pas arrêté.
Les manifestations ont dans un premier temps réclamé le retrait de la réforme fiscale portée par le gouvernement du président Ivan Duque. Cette réforme comprenait notamment une augmentation de la TVA sur les services de base (électricité, gaz…) ainsi qu’une baisse du plancher d’imposition sur le revenu, décuplant la pression fiscale sur les classes populaires. Après une semaine de manifestations violemment réprimées par les forces de l’ordre, la réforme est abandonnée. Mais cela n’a pas suffi à arrêter le mouvement de contestation qui a depuis pris un caractère plus général de lutte contre les inégalités, l’aggravation de la situation sociale du pays et la violence des forces de l’ordre.
Dans un des pays les plus inégalitaires au monde, où le taux de chômage est monté à 16,8% et où 42,5% de la population est sous le seuil de pauvreté, le gouvernement colombien planifie de nombreuses réformes anti-sociales : une nouvelle version de la réforme fiscale est prévue ainsi qu’une refonte du droit du travail et une libéralisation du système de santé, tout cela après la réforme des retraites de 2019 qui avait déjà provoqué d’immenses manifestations. Pour défendre ses réformes face au mouvement populaire, l’État Colombien n’a pas hésité à mobiliser plus de 47 000 agents des forces de l’ordre et à faire déployer l’armée. Cette répression, qui a fait une trentaine de morts et des centaines de blessés en seulement deux semaines est également portée par des civils armés issus des classes aisées. La participation de ces milices de riches à la répression, ayant notamment pris pour cible les populations indigènes très impliquées dans la contestation, est un symbole de l’intensification de la lutte des classes en Colombie : la bourgeoisie est prête à toutes les atrocités pour faire passer ses réformes visant à accentuer l’exploitation.
Malgré les nombreuses condamnations à l’international provoquées par la violence de la répression, les États-Unis ont affirmé soutenir le gouvernement colombien. Cela n’a rien d’étonnant. Depuis des décennies, les États-Unis considèrent l’Amérique Latine comme leur pré carré. Ils possèdent sept bases militaires en Colombie et entretiennent des liens étroits avec son gouvernement depuis la mise en place du “Plan Colombie”. Ce plan, mis en place depuis 2000, est une « aide » financière et militaire américaine servant officiellement à lutter contre le narcotrafic en Colombie. En réalité, ce plan à plus de 10 milliards de dollars a été un moyen pour les impérialistes étatsuniens de renforcer leur influence sur le pays. Cela a notamment servi à lutter quasi-exclusivement contre les FARC avant leur liquidation. Ils menaçaient alors la stabilité des institutions colombienne et donc des investissements étatsuniens. Au final, le plan n’a eu aucun effet sur le narcotrafic, la production de cocaïne ayant même augmenté de plus de 50 % entre 2000 et 2014. Il a cependant permis aux États-Unis de renforcer leur présence sur le continent sud-américain.
La juste révolte des masses populaires colombiennes face aux nombreuses réformes anti-sociales du gouvernement est la conséquence de décennies d’accentuation des inégalités. Le soutien des États-Unis au gouvernement colombien, malgré la violence de la répression, montre que les luttes en Colombie ne doivent pas se limiter à des luttes contre des réformes, ou à des luttes pour un changement de gouvernement. C’est toute l’influence de l’impérialisme étatsunien, et le capitalisme bureaucratique corrompu, qui doivent être remis en cause. Les impérialistes et leurs agents, comme Ivan Duque, n’hésitent jamais à inventer de nouveaux “plans Colombie” lorsque leurs intérêts viennent à être menacés. Le mouvement populaire, et les révolutionnaires de Colombie en premier plan, s’organisent pour lutter pour renverser ces montagnes qui oppriment le peuple.